mercredi 30 novembre 2011

Axoum, Kaleb, Ezana, suite et fin

Ce que l'encyclopédie Universalis ne dit pas de l'Ethiopie, n'en déplaise à mon auguste mère qui suit mon périple par encyclopédie interposée, c'est j'ai pris mon petit déjeuner ce matin. Eh bien a peu de choses près dans le jardin d'Eden. 
Déjà deux jours à Axoum, et décidément je ne voyais toujours ce que cette ville avait d'ennuyeux. Je n'avais pas découvert le parc Ezana qui m'échappait toujours, mais j'en découvris un autre, privé celui-là, le jardin de l'hôtel Kaleb, où j'avais atterri après avoir claqué la porte au nez des margoulins de l'Africa hotel, que je ne recommanderais à personne, même si sa proximité de la gare routière en fait nécessairement une adresse fréquentée - à tort, car en tuktuk tout est possible.


Ermias, propriétaire de l'hôtel Kaleb, est l'un des professionnels de l'hôtellerie de longue date rencontré sur ma route. Cet hôtel existe depuis une trentaine d'année et appartenait à son père. Il l'a récemment agrandi et rénové, et les chambres sont accessibles à tous les budgets. En ville, Ermias est connu comme le loup blanc, on le salue ou on l'évite, mais il est une sorte de célébrité locale, en plus d'être un hôtelier accueillant: il n'est en effet pas très courant qu'on laisse aux clients les clés du bureau pour que vous alliez vous connecter à internet sur l'ordinateur du patron entre la caisse -pleine- et les registres de l'hôtel.


En octobre, l'Ethiopie est à peu près partout vert pomme. Notre printemps n'est rien au regard de ce qui s'y passe juste après la saison des pluies - du moins dans le centre et le nord du pays. "Là, tout n'est qu'ordre et beauté, Luxe, calme et volupté", à ceci près que les chiens courent après les chiennes, les pinsons volettent après les pinsonnes et les fleurs sont belles comme des camions afghans. Des oiseaux étranges au plumage bleu métallisé mâtiné de reflets verts picorent les goyaves qui poussent en telle quantité qu'hommes et oiseaux peuvent se partager la ressource sans conflit. 



Cela dit, il faut aimer la goyave, ce fruit fadasse au goût de pas grand chose que l'on vous sert partout là-bas et surtout en jus infâme à la consistance si solide qu'on vous donne une paille ET une petite cuiller pour en venir à bout. 



Dans ce jardin, il y a une sorte de paillote, offrant une ombre bienvenue car j'ai les oreilles qui rougeoient comme des lumignons depuis deux semaines. Et si je n'ai guère eu l'occasion d'apercevoir plus d'une demi oreille d'hippopotame sur le lac Tana, je suis assaillie par des oiseaux incroyables partout, du type de ce volatile indéterminé apparenté au moineau, version bariolée :


Dans l'arbre au fond du jardin, c'est le coin des perruches sauvages et autres oiseaux inconnus a crête avec une très longue queue, semblables à des cacatoès beiges, trop rapides pour l'objectif de ma caméra.
Et tout ce beau monde s’égayait devant moi pendant que je mangeait du pain au miel en sirotant un café, en poussant des exclamations a chaque fois qu'un nouveau volatile venait faire du rase-mottes au-dessus de mon assiette...

Aucun bruit urbain de vient polluer l'atmosphère sonore, seulement troublée par quelques gazouillis intempestifs, le tintement de la petite cuiller sur le bord de la tasse et le crissement des chaises de bambou.
Eva avait raison, Axoum est un lieu privilégié pour laisser passer le temps. Stèles, obélisques et palais visités, si l'ennui gagne très vite les touristes, c'est qu'ils n'ont pas encore saisi que c'est dans un jardin que l'on attend que le temps passe à Axoum.

Je me suis donc remise en quête de mon fameux jardin public, dont il m'avait semblé trouver l'entrée la veille en bordure de la rue principale, mais lorsque je m'y rendis, si je découvris un autre jardin extraordinaire, ce fut celui d'un ancien palais royal d'Hailé Sélassié, qu'il donna à l'Etat pour en faire une bibliothèque universitaire.


Il existe une petite université à Axoum, construite essentiellement grâce à des fonds de la GIZ, l'agence de coopération allemande. J'ai jeté un œil aux ouvrages à la disposition des étudiants sciences humaines dans cette BU . Leur fond est composé des ouvrages des bibliothèques occidentales mis au pilon, car obsolètes. Les ouvrages en anglais, largement majoritaires, datent, pour les plus récents, des années 1980 et sont des essais de littérature "grise" traitant de la situation américaine, de la guerre froide, de l'analyse poussée de la politique économique de JFK et Jimmy Carter, etc.

Finalement, c'est par hasard que je découvris le parc Ezana, aussi introuvable qu'évident, au beau milieu de la place centrale d'Axoum.


Sur quelques dizaines de mètres carrés, le parc Ezana s'étend - s'étendre est un bien grand mot pour ce square compact- en triangle entre les deux axes principaux d'Axoum. Son format ne l'empêche pas d'abriter au moins deux cafés et quelques vestiges de la période sabéenne disséminés çà et là au gré des deux allées. 


Fleurant bon l'anarchie jardinière, les haies poussent comme elles l'entendent, tenues simplement par des morceaux de bois, mais le résultat n'a rien à envier aux espaces verts rationnels et régentés de nos villes.

Et de fait, le café y était excellent.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire