samedi 17 décembre 2011

Interlude


En attendant les histoires de cette deuxième partie de voyage entre Addis Abeba et l'est du pays, Dire Dawa et Harar, un petit interlude en musique et en danse, depuis le restaurant Yod Abyssinia d'Addis Abeba, où il est absolument impératif de réserver, mais où il est tout aussi impératif d'aller mettre son nez -et ses doigts- car les injeras traditionnelles sont préparées avec un souci de l'esthétique tout particulier.
Ce n'est pas un endroit réservé aux Farangis et autres touristes de tous horizons, la clientèle y est très mélangée. C'est juste une excellente adresse, à consommer avec modération pour les plus low costs des routards, une adresse aussi emblématique d'Addis et de l'Ethiopie que pourrait l'être le Bouillon Chartier à Paris, le Vauban à Brest et l'Excelsior à Nancy...
Les robes des serveuses font envie, bien que les robes qu'elles portent - saumon, jaune pâle - ne siéraient assurément pas à un teint un peu trop "fromage frais"... Rose saumon sur teint d'aspirine fraîche, ça manque de relief...

Quant aux danseurs et danseuses qui exécutent durant une partie de la soirée des danses et chants de nombreuses ethnies éthiopiennes, Oromo, Guragué, Konso, etc... on en laisserait refroidir son assiette...






mercredi 14 décembre 2011

Ce plat pays qu'est l'Ethiopie...

Depuis mon retour, j'ai laissé un certain nombre d'articles en plan, happée par un quotidien qui se réinstalle si vite et si bien que l'on ne peut plus lever l'ancre sans effort.

Pour s'y replonger, il faut repartir en Afrique, voir et entendre, à défaut de sentir. En route, donc, pour 160 secondes sur la route de Gondar à Débark, en direction du Parc du Simien.





A mon retour, j'ai été assez frappée de l'image spontanée qu'évoquait l'Ethiopie dans mon entourage.

Reprenons depuis le début : premièrement, l'Ethiopie n'est pas un plat pays qui s'étend langoureusement vers la mer Rouge, avec des côtes sableuses et ensoleillées.
L'Ethiopie n'a plus d'accès à la mer depuis la guerre compliquée et fratricide qui l'a opposée à l'Erythrée, qui, avec son indépendance, a privé l'Ethiopie de 1150 km de côte sur la mer Rouge. Annexée par l'Ethiopie en 1962 et devenue indépendante en 1993, l'Erythrée a dès lors souvent dû défendre sa souveraineté par les armes, particulièrement entre 1998 et 2000, contre les velléités d'annexion éthiopiennes.



La tension persiste, raison pour laquelle, bien que l'on ne puisse parler de guerre, cette zone frontalière est fragile, instable : les Ethiopiens considèrent que l'Erythrée et l'Ethiopie forment une seule et même entité culturelle, religieuse et linguistique, et d'un point de vue stratégique et économique qu'un accès de 1000 km à la mer Rouge ne serait pas superflu plutôt que de faire acheminer les container par Djibouti.



Plaines (hauts plateaux) du Tigré, monastère orthodoxe, à l'horizon, la frontière érythréenne

Ensuite, l'Ethiopie n'est pas un pays foncièrement instable, au bord de la guerre civile, où l'armée se promènerait dans les rues, armée jusqu'aux dents prête à bondir. Si, bien sûr, la reconnaissance de la frontière avec l'Erythrée est un processus compliqué, l'Ethiopie est associée à tort à ses voisins plus instables, la Somalie (bien que le Somaliland fasse tampon entre les deux), le Soudan, etc.
Mais si les tensions entre le gouvernement central et certaines régions (l'Ethiopie est un pays fédéral) rend certaines zones impraticables, l'Ethiopie est un pays pour l'instant stable, aux relations pacifiques -du moins diplomatiques- avec ses voisins.
Stable ne signifiant pas démocratique, pas encore, cette stabilité dissimulant à peine un régime sans alternance politique, bien qu'il ne s'agisse pas d'une autocratie militaire.
Stable signifiant simplement que l'on peut se rendre sans danger dans la majeure partie du territoire Ethiopien, même seul(e), à condition de s'être un minimum informé au préalable.

Sans rentrer -du moins pas tout de suite- dans les questions sociales, économiques et les rapports interculturels qui ne sont pas toujours simples, il ne faut pas sous-estimer que l'Ethiopie est surtout un pays truffé d'endroits où il fait très bon vivre, de cafés où tout n'est que calme et volupté, et ce luxe n'est pas réservé aux quelques touristes qui s'aventurent jusque là, mais fait résolument partie du mode de vie des Ethiopiens  :

Un café à Dire Dawa où l'on ne sert... que de l'eau... mais pétillante, et locale!

On ne vient donc pas ici pour ce qu'il y a à boire...

... pas plus que l'on ne vient au Parc Ezana d'Axoum uniquement pour le café...

Enfin, dernière idée préconçue (ou pas conçue du tout plutôt) qui ne survivra pas à ce post : l'Ethiopie n'est pas un plat pays au ciel si bas qu'un canal s'est perdu mais un immense territoire aujourd'hui aussi vaste que l'Allemagne et la France réunies, que la grande faille du Rift est-africain a sculpté à la truelle. Des hauts-plateaux et montagnes titanesques surplombent les nuages, et par endroits, la croûte terrestre, s'affinant au creux de la grande faille, s'enfonce à plus de 100 m sous le niveau de la mer tandis que des volcans, parfois encore en activité, serpentent du nord au sud dans l'est du pays.

De l'avion, quelque part entre Gondar et Axoum

Dans le massif du Simien, le Ras Dashen culmine à 4600 mètres, juste au dessous du niveau du Mont-Blanc, c'est le 4ème pic le plus haut d'Afrique. Outre le Ras Dashen, la majeure partie du pays, au nord, est une immense succession de hauts-plateaux à une altitude située entre 1800 et 3000 mètres, parfois plus, rythmés de pics et brusques dépressions que les eaux de ruissellement annuelles ont creusé dans le basalte avec constance depuis des millions d'années, formant des paysages reconnaissables entre mille.



Dans le Simien

Et la traditionnelle grande plaine où pait le bétail est plutôt en Ethiopie un immense plateau perdu dans les nuages à environ 1 kilomètre de dénivelé abrupt du palier d'en dessous.


Nettement plus au sud, Addis-Abeba, située entre 2300 et 2600 mètres d'altitude est donc la capitale la plus haute d'Afrique, et la 4ème capitale la plus haute du monde.


Addis, au creux des montagnes, au pied du Mont Entoto

L'immensité du territoire éthiopien, de -120 à 4600m d'altitude, fait que l'on passe du désert du Danakil à la végétation luxuriante des bords du lac Tana, des massifs montagneux à la vallée de l'Omo : peu de pays présentent une telle diversité de climats et de conditions de vie, des plus douces aux plus difficiles, déserts ou hauts plateaux.

Ni un grand désert, ni une grande savane, l'Ethiopie...













mercredi 7 décembre 2011

Mums for Mums



Mums for Mums


Mums for Mums est une ONG éthiopienne dont le siège est à Mekelle. Elle a été créée et reste entièrement administrée par des Ethiopiens, même si les fonds ne sont pas locaux et sont, entre autres, issus de la Commission Européenne.

Counsellors
Mums for Mums a pour but de sortir les mères isolées de la dépendance et de la misère. Une jeune mère seule, non mariée, a en effet ici peu de chances de s'en sortir sans l'aide de sa famille, qui ne peut pas toujours subvenir à ses besoins, ou ne le veut pas nécessairement, surtout si elle a eu un enfant hors-mariage. Peu éduquées - elles ont souvent arrêté l'école, quand elles y ont été, beaucoup trop tôt pour trouver un emploi, surtout avec un enfant qu'aucune structure ne peut prendre en charge -, elles en arrivent trop souvent à mendier.

A Mekelle notamment, mais aussi à Dire Dawa et Harar, il n'est pas rare de voir des mères seules, ayant vieilli trop vite, mendier avec leur(s) enfant(s) sous le bras.


L'idée de Wzo Tebereh Woldegabriel, la fondatrice de Mums for Mums, a donc été de créer une structure où ces femmes pourraient confier leurs enfants à une crèche afin d'avoir accès à une formation pratique (couture, cuisine, tissage, etc.) leur permettant à la fois de subvenir à leurs besoins et de monnayer une compétence sur le marché du travail.

Ces femmes devant impérativement être, avec très peu de capitaux, opérationnelles très rapidement, on leur dispense des formations leur permettant également de survivre, voire de commercer, avec rien : on leur apprend à cuisiner confitures et plats avec les matières premières gratuitement à disposition autour d'elles : cactus, plantes, fruits et légumes sauvages, etc.

Peu à peu, Mums for Mums a diversifié ses compétences, et ils accueillent également des personnes âgées isolées durant la journée, organisent des journées de dépistage de la cataracte, des journées de prévention contre le SIDA, des ateliers sur la nutrition, etc, etc...

Discrète, cette ONG a pourtant ouvert des annexes à Axoum, à Adwa et bientôt à Bahar Dar.
A Axoum, leurs missions semblaient plus floue, ils ne disposaient pas d'un grand centre, comme à Mekelle, permettant l'accueil des jeunes mères. Un petit bureau semblait uniquement servir de support technique et juridique à d'autres associations très diverses.


A Adwa, ils étaient en train d'ouvrir un centre informatique avec 25 PC et internet pour la formation des jeunes.

Dans chaque ville ils semblaient avoir une mission et des objectifs différents et, même si le centre de Mekelle œuvre à des actions on ne peut plus concrètes, leurs objectifs ailleurs semblent plutôt guidés par l'opportunité que par les fins initiales de leur ONG.
Qu'importe, il se passe des choses, et bien que ce soit, une fois de plus le Tigré qui bénéficie de ce genre d'initiatives, ce n'est pas pour autant qu'ils n'en ont pas cruellement besoin.


dimanche 4 décembre 2011

La véritable histoire de la reine de Saba et du Roi Salomon

Les Erythréens la croient Erythréenne, les Yéménites Yéménite, les Ethiopiens Ethiopienne, les sceptiques n'y croient pas et l'immense majorité de l'Occident a spontanément en tête une reine à la peau laiteuse se promenant en soutien-gorge affriolant dans les couloirs de son palais :

Gina Lollobrigida dans le péplum La Reine de Saba et le Roi Salomon de King Vidor

La reine de Saba, qui qu'elle fut, n'a probablement jamais ressemblé à la belle Gina, est bien plus certainement une Habesha - Habesha désignant, par opposition aux Farangis, les Blancs, les Ethiopiens, incluant les Erythréens et désignant, par extension, la culture correspondante - et nous partirons ici du principe qu'elle ressemblait plutôt à ceci :

Peinture anonyme de la Reine de Saba en route pour Jérusalem au musée national d'Addis Abeba

Ca fait moins péplum, mais beaucoup plus Habesha...
Tilahun, le plus farfelu guide axoumite, nous a très vite mis les points sur les i avec une force d'âme qui nous fera retenir longtemps la

VÉRITABLE HISTOIRE DE LA REINE DE SABA ET DU ROI SALOMON

La Reine de Saba, la plus grande et la plus belle des reines africaines, éclipsant tout ce qu'une Cléopâtre a pu apporter de beauté et de nez à l'histoire légendaire mondiale, était, au 10ème siècle avant J.C., la reine du peuple sabéen, civilisation évoquée plus bas, situé quelques part entre le Yémen et l'Ethiopie, nous ayant légué les obélisques, les menhirs et quelques tombeaux à l'architecture tout de même assez fascinante...

La reine avait entendu parler d'un grand roi Juif, très riche, très intelligent et très sage, dont la réputation rayonnait bien au-delà de son royaume, Salomon.

Elle envoya alors l'un de ses sujets jusqu'en Israël pour lui vendre de l'ivoire, des pierres précieuses, de l'or, et surtout pour s'enquérir de la réputation de ce roi, qui, bien qu'il ne partage pas sa religion, faisait forte impression jusque dans son royaume.

L'émissaire alla jusqu'en Israël, constata la richesse et la sagesse de Salomon, et s'en revint dans le royaume de Saba en faisant de Salomon un portrait si enthousiaste qu'il aiguisa encore plus la curiosité de la reine.

Elle décida alors d'aller elle-même constater la grandeur du royaume d'Israël et de son roi. Elle était certainement assez piquée au vif de la réputation de Salomon, dont les commerçants venus d'ailleurs diffusaient une image déjà légendaire, et ne pouvait s'empêcher de vouloir se comparer à lui, car elle était elle-même très riche, très belle et très intelligente. Elle aurait bien aimé, elle aussi, qu'on parle d'elle jusqu'à Jérusalem. Mais surtout, elle voulait comprendre quelle était la religion de ce souverain, car elle ne pouvait concevoir qu'un homme d'une telle qualité ait une religion différente.

Je laisse Tilahun raconter la suite, sans commentaire...


La VF sera prête dans quelques temps pour ceux qui n'auraient pas tout saisi